Or, la belle-mère de Simon était au lit, elle avait de la fièvre. Aussitôt, on parla à Jésus de la malade. Jésus s’approcha, la saisit par la main et la fit lever. La fièvre la quitta, et elle les servait.
(Mc 1, 29-39)
La guérison de la belle-mère de Simon-Pierre mérite d’être soulignée et décodée, à cause de ce type de maladie, la fièvre, et à cause de la personne guérie, la belle-mère de Simon.
Guérir miraculeusement de la fièvre n’aurait pas dû figurer dans les annales. Bien sûr, dans l’Antiquité, la fièvre était plus dangereuse qu’à notre époque. La fièvre n’est cependant pas un handicap permanent, c’est une maladie temporaire, elle dérègle le cerveau, et symboliquement de là à une maladie de l’esprit, il n’y a qu’un pas. La fièvre est donc non seulement symbole de déprime, mais les Anciens la considèrent d’un mauvais œil, car elle rime avec colère, passion bouillonnante, vice, etc. « Laisse ta colère, calme ta fièvre, ne t’indigne pas : il n’en viendrait que du mal », dit un psaume (36, 8). La fièvre est donc une petite maladie, mais grandement symbolique.
Qu’en est-il de la belle-mère ? Par définition, une belle-mère est quelqu’un qu’on aime en raison de quelqu’un d’autre, et c’est là tout un symbole de la charité chrétienne et de la vie fraternelle dans nos communautés. En tant que chrétiens, nous devons chercher à nous aimer non pas sur des critères d’affinités naturelles, même si ces affinités existent. Aimer chrétiennement, c’est aimer en raison de Jésus-Christ, qui a donné sa vie pour tous. Avec ou sans affinité, mérité ou immérité, notre prochain est aimé par celui à qui nous voulons faire plaisir, Jésus, et donc nous l’imitons. Pareillement dans un mariage, on aime son conjoint d’abord, mais en raison de ce lien indéfectible, on aime aussi les parents de notre conjoint, car le lien aux parents est lui aussi indéfectible : honore ton père et ta mère. Voilà comment on en vient à aimer solidement des gens qu’on n’aurait pas spontanément choisis… Ainsi dans l’Église du Christ fondée sur le roc de Simon-Pierre, l’amour fraternel dépasse les affinités personnelles et les conventions.
Rester couché signifie rester contagieux et désespéré. Bien que souvent malades de toutes sortes de fièvres, le Christ nous prend par la main. Comme pour la belle-mère de Simon, il nous relève, alors seulement la fièvre nous quitte et nous (re)trouvons notre place dans la communauté des fils et filles de Dieu. Ainsi faisons-nous l’expérience au creux de nos vies de ce que sera la Résurrection, au jour où le même Christ nous relèvera dans la Maison de son Père.
Abbé Alexis Morard
doyen